mardi 19 juin 2012

Quand la renaissance efface le doute...

Un bien bel article de Paul-Julien Roux, futur ex-instit rencontré en ligne, avec lequel je partage, j'échange, je parle de tout ce que peux ressentir un fonctionnaire, qui en plus fait le plus beau métier du monde, lorsqu'il réalise que son métier l'enfonce dans l'obscurité et le désespoir...

En échange de ce copié/collé, un peu de pub pour lui.  Il n'ouvre pas de meublés de tourisme lui, mais souhaite vivre de sa plume, allez jeter un oeil... 

 


 Voilà six mois, à quelques jours près, que j'ai quitté ma classe, que j'ai donné mes derniers cours à l'école de la République Française. Six mois que j'ai débuté, dans l'inconnu, ce processus de reconversion dont je savais pertinemment que son accomplissement serait tout sauf simple. Six mois que j'ai quitté le confort (relatif) d'une situation qui ne me convenait plus. Six mois que je me suis paradoxalement ouvert les portes de la liberté, suscitant une certaine forme d'incompréhension chez certains de mes proches, de mes ex-collègues et ex-supérieurs. Car c'est ce qui est important : malgré les difficultés, les échecs, les doutes, la perte financière, je me considère dorénavant comme un être libre et je peux dire maintenant haut et fort que j'assume ce choix, que j'en suis fier, que je le vis extrêmement bien. C'est une belle première victoire, même si bien sûr, le plus dur reste à faire.


  En six mois, j'ai l'impression d'avoir appris et surtout d'avoir grandi plus qu'en dix ans d'enseignement, même si je ne renie pas ces années, loin de là même. Elles sont pourtant derrière moi, et elles font maintenant partie du passé. Point. Certains trouvent ma démarche courageuse, d'autres stupide, et la plupart s'en tapent comme de l'an quarante. Je remercie les premiers pour la confiance qu'ils m'accordent et rétorque aux seconds que la vie mérite d'être vécue, et non d'être subie (quand aux troisièmes, je les comprends tout à fait, et les ignore à mon tour). Vivre une vie qui ne nous convient plus seulement par peur de la perte d'une situation et d'un confort matériel est un choix. Un choix que je peux comprendre, bien sûr, car il peut avoir ses obligations et ses nécessités, mais un choix qui n'est pas le mien. Je n'ai pas besoin d'être jugé pour mes choix. Je suis le maître de mon destin, et comme je l'ai déjà dit, je l'assume (et j'emmerde par la même occasion ceux qui pensent le contraire). La nourriture de l'âme est au moins aussi importante que celle du corps. Je préfère devoir faire des sacrifices "alimentaires" et profiter pleinement de ma vie d'homme, utiliser mon libre-arbitre comme il me sied, en individu libre. Tout le monde le sait : le coffre fort ne suivra pas le corbillard. Car pour moi, le pire serait, comme je l'ai vu chez tant de personnes, de me retrouver à l'automne de ma vie (et même avant !) empli de regrets, d'avoir le sentiment de ne pas avoir assez profité, de ne pas avoir l'impression d'avoir VECU. Le temps des remords. Ils viendront certainement, mais je ne pourrais pas dire que je n'ai pas essayé.


  Depuis six mois, au-delà des considérations matérielles, j'ai l'impression de revivre, de débuter une nouvelle aventure, d'être en totale phase avec moi-même, d'être enfin maître de mon destin, comme je l'ai déjà évoqué. La vie de professeur des écoles ne me convenait pas en ce sens qu'elle m'imposait trop de barrières, de contraintes et de concessions pour pouvoir être vécue sereinement, malgré cette image (d'Epinal) de liberté et de confort associée à l'instituteur et qui est coutume dans la société. C'est peut-être le cas pour certains, mais moi, je ne l'ai pas vécu comme ça. Je n'étais sans doute pas assez dans le "moule institutionnel". Enfin, ce n'était pas non plus un cauchemar, hein, que ce soit bien clair ; il me semble que je me débrouillais plutôt pas mal mais depuis quelques temps, j'avais des envies d'ailleurs, d'autre(s) chose(s). Basta !


  Un changement géographique radical et une mise en disponibilité (dont je viens d'apprendre officieusement qu'elle a été prolongée) plus tard, me voilà sur un nouveau chemin, que j'arpente plutôt sereinement malgré l'épée de Damoclès qui me menace ; l'argent (enfin plutôt son absence), le nerf de la guerre n'est-ce pas ? Tant pis pour l'argent, et peu importe si je dois m'endetter, je suis mon seul guide et je suis ce guide qui n'est autre que moi-même. Un grand merci à Audrey, au passage, ma compagne, qui me soutient et est partie prenante, malgré les sacrifices, de ce projet que certains trouvent fou mais qui je l'espère, portera ses fruits. Elle est la pierre angulaire de l'hypothétique réussite de cette "entreprise". Sans elle, donc, rien de tout cela ne serait possible. S'il y a une personne à qui je dois prouver que j'en suis capable, ce sera toi (et moi aussi, un peu...).


  Alors pour tous ceux, enseignants ou non, qui voudraient changer de vie, ou qui voudraient tout simplement la vivre, cette putain de vie, pour tous ceux qui ont besoin d'autres horizons, d'autres valeurs, qui souhaitent se sentir libre dans ce monde avilissant, je n'aurais qu'un mot en triple exemplaire, foncez, foncez, foncez : la vie est courte et chaque seconde d'hésitation nous rapproche un peu plus de la fin, de ce retour inéluctable à l'état primordial de poussière. Si nous avons une seule chance, c'est celle de vivre dans une contrée en paix, plutôt apaisée. Alors profitons-en, merde, au lieu de nous lamenter sur notre sort de privilégiés... Pour les autres, ceux qui s'estiment heureux, ceux qui ne veulent pas, ou qui ne peuvent pas changer, ou tenter ce changement, profitez, vivez ces instants comme s'ils étaient les derniers. Ils le sont d'ailleurs peut-être, les derniers... Car l'heure approche...



  Nouvelles (pas très) fraîches...


  Pour ceux qui me suivent, peu de nouvelles cet an-ci. En effet, si vous avez lu les précédents articles reconversion, vous savez donc déjà que je me dirige vers un master 2 l'an prochain suite à la validation des acquis et de l'expérience pour reprise d'étude qui m'a été accordée. Il me reste maintenant à m'inscrire à la faculté (fin juin), d'autant que ma disponibilité a été A PRIORI prolongée, même si je n'ai toujours pas le papier officiel (Ben ouais, l'administration... Enfin, j'ai eu quelqu'un au téléphone, c'est déjà une belle victoire... ). Je vais devoir également trouver un financement, dans l'idéal un mix entre un crédit et l'accumulation de petits boulots (cours particuliers ?) cet été et l'an prochain. En effet, pour l'autoentreprenariat, ça m'a l'air d'être bien compromis vus les retours gouvernementaux. Le statut risque fortement de disparaître avant la fin de l'été. Je vais donc attendre un peu histoire de prendre la température...

  Reprise des cours prévue donc le 4 septembre, puis stage au deuxième semestre. En attendant, je continue de publier des articles pour Agoravox, Educavox, Hype Webzine (chroniques à venir dans le n°4 qui sort le 1er juillet) en temps que bénévole. Je souhaiterais maintenant pouvoir publier en facturant mes services, en travaillant en free-lance par exemple... Si quelqu'un a des infos, une idée ou des plans, je suis preneur... Après quelques jours d'un repos bien mérité (?), je ne manquerai pas de m'atteler à cette tâche.

  A bientôt...



Quelle que soit la manière d'aborder le changement,
 soyez en fiers...

Quelle que soit la manière d'aborder le changement, soyez en fiers... De la Zep aux Étoiles


mardi 12 juin 2012

Les travaux avancent

Bon ben là c'est vraiment parti !








Parce que la salle de bains était ridicule, elle n'existe plus... La prochaine étape sera de remonter une cloison plus loin, et de refaire les arrivées et les évacuations d'eau en PER et PVC.

Salle de bains ridicule - De la Zep aux Étoiles


Pour l'instant, je suis en plein dans l'électricité. Tout mettre aux normes, tout nickel, tout beau. 
Mais c'est du travail ! Tirer de nouvelles lignes, lignes à raccorder à de nouveaux disjoncteurs ad hoc, séparer les circuits, protéger la salle de bains, installer des spots, des lustres, des appliques, de nouvelles prises chic et classe, changer de place des interrupteurs... 

J'ai deux règles pour bien bricoler:
  •  Avoir le bon matériel pour ne pas avoir à bidouiller avec des outils qui font "office de" qui font perdre un temps monstrueux et garantissent un résultat bâclé.
  • Avoir deux ou trois exemplaires de chaque outil, pour ne pas perdre du temps à chercher partout son crayon, pour ne pas faire d'allers-retours inutiles, et parce que chaque tournevis, chaque marteau, chaque forêt est légèrement différent de l'autre et convient là où le premier n'allait pas.

Le souci, c'est que j'en mets un peu partout...........


















mercredi 6 juin 2012

Je démissionne, vous n'avez pas oublié ?

Je démisionne - IDV - MammouthL’inspection académique ne répond plus...

On est le 6 juin, vous m'avez accordé 24000 euros d'Indemnité de Départ Volontaire, vous m'avez proposé de démissionner au 1er juillet, soit dans une poignée de semaines, j'ai dit ok, et puis rien...



Il y a bien eu la lettre mémorable du 3 avril, je me suis bien marré et j'ai fourni les pièces demandées.

Il y a quelques jours j'ai eu un appel sur mon répondeur de la même personne, mémorable aussi

"Bonjour, c'est Mme "Truc" à l'inspection académique; je vous appelle au sujet de votre IV... de votre DV... oh flûte! de votre départ, il faudrait que vous me fassiez parvenir au plus vite le Certificat d'inscription au répertoire des entreprise et établissements (SIRENE) (...)" Elle est marrante Mme Truc, je ne sais pas d'où elle sort mais elle me fait sourire...

Je lui ai donc envoyé ce qu'elle demandait, même si je ne sais pas pourquoi elle me demande cela, mais bref, j'ai passé le temps où je me mettais en colère contre eux, je suis plus dans une attitude de pitié, voire d'empathie, comme envers un proche qu'on n'a jamais vraiment aimé mais qui va nous quitter irrémédiablement...

C'est déstabilisant, incompréhensible, cette attitude... Du début à la fin. Nouveau prof plein de bonne volonté mais désarmé, j'ai été balancé dans une école difficile, ZEP, zone violence, ya pas mieux pour commencer. Personne ne m'a aidé. Dès le premier jour ma porte de classe était fermée, démerde-toi.

J'ai été souvent absent, en plein désarroi, en pleine culpabilité, ne me rendant pas compte à l'époque que ce métier ne me convenait pas. Arrêt maladie, puis prolongation, et encore prolongation. Aucun médecin "expert" n'est venu me voir. Drôle de statut. pas de médecine du travail, jamais en 10 ans d'exercice, incroyable mais vrai. Aucune contre-visite en cas d'arrêt maladie prolongé. Aucun soutien, aucune aide. J'ai pris à l'époque un rendez-vous avec un conseiller mobilité carrière; résumé de l'entretien: et oui c'est pas facile mais on peut rien pour vous.

Il y a quelques mois mon inspecteur de circonscription, halluciné qu'un de ses agents puisse avoir l'envie de faire autre chose, m'avait même menacé: "Je signe votre papier de demande d'IDV, mais c'est donnant-donnant, vous restez jusqu'au bout de l'année scolaire."

Je me suis barré en janvier, dépité et révolté contre ces classes tenues par des incapables, contre ces heures à effectuer en vain, et aussi parce que cet inspecteur se lançait dans une assimilation houleuse des noms de famille, ma femme et moi on bosse dans la même commune... Elle ne terminera pas non plus sa carrière comme enseignante, c'est certain, mais pour le moment elle fait un boulot remarquable et je ne voulais pas que l'inspecteur la fasse trinquer...

Ben rien. Aucun rappel à l'ordre, aucune visite de médecin-expert, aucune nouvelle...

Il n'y a qu'en voyant ma paie que je me dis qu'ils ont bien saisi que je me barrais. Je n'ai reçu que 800 € ce mois-ci, preuve que les calculatrices fonctionnent,  je suis à mi-traitement depuis quelques mois, normalement on ne peut me payer moins que le SMIC, mais comme je tire ma révérence dans 25 jours, il faut que les comptes soient soldés d'ici-là.

Ça ne me tracasse pas plus que ça; mes nuits sont occupées à gérer des problèmes de mises aux normes électriques, de pince à sertir le PER, de site Internet à lécher. Mais quand même, quelle désinvolture de leur part !



Il y a 17 ans, je me formais au BAFD. Nous devions rédiger un projet éducatif, sorte de trame philosophique qui déciderait nos projets pédagogiques, nos raisons motivées d'élaborer des séjours pour enfants, dans quel but et pourquoi. Je me souviens avoir mis noir sur blanc une idée forte qui aujourd’hui encore est à l'origine de mes décisions: vouloir rendre les gens libres, autonomes, responsables, épanouis, suppose que ceux-ci connaissent les cadres, les limites. On n'est libre et heureux que dans un cadre dont on connaît -dont d'autres nous ont appris à connaître- précisément les limites.

C'est ma façon de voir la vie. Je te donne à vivre, je te dis tout ce que tu peux faire et te donne les moyens et les objets pour t'épanouir; je te dis ce qui est interdit, je te dis là où tu peux aller, je te précise ces frontières, je te rappelle à l'ordre si tu les dépasses, je t'encadre fortement au départ puis de moins en moins au fur et à mesure que tu comprends comment t'épanouir dans ce cadre.

J'agis comme ça avec mes filles. J'agis comme ça même avec mon chat ! J'ai agi comme ça avec mes élèves. Je veux proposer un tel cadre pour mes meublés de tourisme, confort, épanouissement, et cadre formel qui rassure et qui évite des dérives, sanctionnées si elles se manifestent.

Une philosophie aux antipodes des attitudes de ma hiérarchie. Personne ne m'a dit ce que je devais faire, ce que je pouvais faire ou non, personne ne m'a rappelé les règles, personne ne prononce des paroles et des actes cohérents, personne ne me dit clairement les choses. 

Pendant des années j'ai bricolé du mieux que je pouvais en classe, sans aucun retour. Mais à la première provocation, tout le monde m'a cherché des poux. 

Est-ce une tare de cette énorme machine protéiforme qu'est l'éducation nationale ? Est-ce une composante de l'esprit humain ? 

Quand on est plus de quatre on est une bande de cons, disait Brassens...